LES VOYAGES DU CONTEUR DE LEGENDES
Le jeune couple de la calèche
Deux heures sonnaient au clocher
de la petite église de mon village. J’étais parti faire ma promenade
journalière. Le ciel, d’un bleu profond, laissait le soleil inonder mon visage.
Mon chapeau de paille un peu juste, je choisi un arbre bien feuillu et je me
mis à son ombre avec l’envie d’y faire une belle sieste. La chaleur était accablante. Fatigué,
j'éprouvais un invincible besoin de repos. L'ombre était engageante, je
m'étendis au pied de l’arbre, une racine me servant d’oreiller. Un demi-sommeil
commençait à me gagner, lorsqu’un bruit de sabots me tira de l'engourdissement où
j'étais plongé. Une élégante calèche emmenée par deux superbes chevaux roulait
sur le chemin puis s’arrêta non loin de moi en m’ignorant. Le conducteur de ce bel
équipage était un homme d'une trentaine d'années. Son visage avait une
expression de gravité que tempérait la douceur de son regard. A ses côtés était
assise une jeune femme dans tout l'éclat de la jeunesse et de la beauté. Elle
tenait sur ses genoux un panier recouvert d’une jolie serviette à carreaux. En
les regardant mieux, une drôle d’impression fit place à mon agacement, je ne
saurais dire lequel était le plus pâle. Dans nos campagnes, l’air et le soleil
burinent les visages et le bon vin rosit les joues. Manifestement ils n’étaient
pas de la région. L’attelage arrêté, le jeune homme en fit le tour et donna sa
main à la jeune fille qui descendit avec grâce. Ils étaient richement habillés mais
à mon avis bien trop chaudement pour l’époque. Et bras dessus, bras dessous
sans sembler être le moins du monde incommodés par la chaleur, ils s’éloignèrent
dans la prairie toute proche. La jeune femme déposa avec beaucoup de soin d’appétissantes
victuailles sur une nappe finement brodée. Assis l’un contre l’autre sur une
souche d’arbre, ils déjeunèrent sans se dire un mot me semblait-t-il. Les chevaux
avaient une patience d’anges et attendaient silencieusement en dégustant quelques
feuilles. Je m’endormis. Je fus tiré de
ma sieste par une mouche trop curieuse. En
voulant la chasser, je m’aperçus que j’avais un bouquet de violettes dans ma
main. Plus de trace de l’attelage ni du jeune couple. Je me levais péniblement et curieux je voulu
voir de plus près l’endroit qui m’intriguait et où il me semblait que les deux voyageurs
s’étaient installés pour déjeuner. Enfin c’est ce qu’il me sembla car je ne retrouvais
dans l’herbe en tout et pour tout que quelques fleurs qui n’avaient pas été cueillies.
Je posais le bouquet de violettes sur la souche et je m’éloignais en me retournant plusieurs fois.
Christian LUZERNE Conteur de
Légendes
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